Stratégies pour améliorer la scolarisation des groupes sous scolarisés

Stratégies pour améliorer la scolarisation des groupes sous scolarisés

Les enfants les moins scolarisés sont essentiellement issus de milieux pauvres vivant majoritairement dans les zones rurales. Leurs parents sont soit nomades ou sédentaires, agriculteurs, éleveurs ou pêcheurs. Mais ce qui les caractérise, c’est qu’ils sont en manque de ressources financières et de vivres pour manger décemment. Un déterminant important de ces milieux à faible scolarisation, comme cela a été souligné, c’est la ruralité de leur mode de vie, basé sur des activités agro-pastorales

Les principaux groupes cibles sous scolarisés au Mali sont donc les enfants en milieu rural et surtout les filles, les enfants en milieu nomade et certaines catégories d’enfants particulièrement vulnérables.

Dans la réflexion sur les stratégies, le choix a été fait de focaliser les stratégies clés sur le groupe cible le moins scolarisé que constituent les filles en milieu rural. En apportant des solutions pertinentes pour leur scolarisation, on répond aussi aux besoins des garçons et on atteint la proportion la plus importante des enfants non scolarisés du Mali, qui est aussi la plus pauvre.

 Les stratégies d’accélération de la scolarisation des filles en milieu rural

Le taux brut de scolarisation est évalué à 72,2% en 2004-2005 mais la valeur de cet indicateur varie selon le genre et la localisation comme cela a été souligné au point 2.3.dans la section relative aux disparités Ce taux de scolarisation est de 82,9% pour les garçons et de 61,9% pour les filles (indice de parité de 0,75) il a aussi été souligné que l’accès en 1ère année , la rétention et l’achèvement sont fonction du genre : alors que le TBA en 1ère année et le TAP pour les filles en milieu rural sont en 2005 respectivement de 53,2% et de 24,9% ceux des filles en milieu urbain se situent autour de 80,8% et 59,6% ( contre 69% et 4,8% pour les garçons ruraux et 99,3% et 68,8% chez le garçons urbains).

Ainsi les filles rurales ont des chances moindres que les garçons (aussi bien ruraux qu’urbains) de faire une scolarité jusqu à la dernière classe du primaire.

Cette situation se poursuit, de façon amplifiée, par la sous représentation des filles au 2ème cycle du fondamental et dans les IFM, où leur taux de déperdition est plus élevé que celui des garçons. Les femmes sont également sous représentées dans l’Enseignement Fondamental (26,42% du personnel en classe au 1er cycle et 17,84% au 2ème cycle en 2004-2005) et plus particulièrement en milieu rural et très peu sont Directrices d’écoles. Par ailleurs la politique de rapprochement des conjoints fait que relativement peu de femmes mariées enseignent en milieu rural. Toutes choses qui contribuent à la sous scolarisation des filles.

Pour réduire les différents écarts entre filles et garçons en termes de parité et d’égalité, particulièrement en milieu rural et dans les zones les plus défavorisées, et pour accroître la proportion de femmes dans les IFM et dans le corps enseignants, le Programme créera une dynamique d’accélération de la scolarisation des filles basées sur les stratégies suivantes :

(1) Le développement de mesures spécifiques d’accompagnement pour la scolarisation des filles

(2) La mise en oeuvre de la politique de formation initiale et continue des maîtres prenant en compte l’aspect genre

(3) La mise en place d’un partenariat multisectoriel pour l’accélération de la scolarisation des filles

(4) Le renforcement du plaidoyer et l’élaboration d’un plan de communication pour l’accélération de la scolarisation des filles

(5) Le renforcement de la capacité des structures pour dynamiser et suivre la stratégie d’accélération de la scolarisation des filles

(6) La mise en place d’un dispositif de financement pour la mise en de la politique d’accélération de la scolarisation des filles

Plus spécifiquement il s’agira :

Généralisation de l’inscription paritaire filles/ garçons en 1ère année et dès l’age de 6ans

Réduction des charges financières liées à la scolarisation au niveau des familles pauvres afin d’améliorer la fréquentation scolaire des filles (appui aux familles démunies, et autres incitations)

Extension de la couverture des écoles fondamentales à second cycle en milieu rural,

Application d’une stratégie de construction de latrines séparées pour garçons et pour filles,

Accroissement du nombre de cantines scolaires (comme outil d’accès, de maintien et d’achèvement scolaires) pour améliorer l’accès à l’école, notamment celui des filles. Dans cette perspective, il est envisagé d’accroître le taux de couverture des écoles en cantines scolaires, au profit des écoles dont au moins 30-35% des élèves sont obligés de parcourir 3km ou plus pour se rendre en classe, dans les régions de Kayes, Koulikoro, Mopti, Tombouctou, Gao et Kidal. Les écoles publiques et communautaires du 1er cycle dans les communes considérées comme vulnérables au plan de la sécurité alimentaire par le Commissariat à la Sécurité Alimentaire, quelles que soient leurs régions d’appartenance, seront également prioritaires.

Conception et mise en place d’un système de parrainage

Développement de systèmes de tutorat et d’entraide scolaire élèves-élèves, jeunes- élèves et adultes-élèves

Mise en place de stratégies locales spécifiques pour scolariser les filles en situation difficile

Recrutement sur poste dans l’enseignement fondamental en privilégiant les candidatures féminines.Dans les IFM :

Organisation de session de formation en faveur des filles en vue de leur préparation au concours d’entrée dans les IFM.

Formation des professeurs des IFM au genre et à l’analyse de leur pratique de classe liée au genre.

Elaboration des curricula de l’enseignement normal en tenant compte du genre,

Déconcentration du concours de recrutement au niveau de chaque Académie d’Enseignement.

Augmentation du nombre des IFM des filles / femmes.

Fixation d’un quota à l’entrée des filles dans les IFM mixtes.

 Le rapprochement écoles domiciles et l’offre de cycles complets

L’accès et le maintien des enfants à l’école diminuent en fonction de la distance domicile école. Les travaux du RESEN ont permis de noter que dans l’ensemble de la population, 64 % des enfants ont une école à moins de 1 Km (95 % en milieu urbain contre 60 % en milieu rural). Cependant, près de 30 % d’enfants ont plus de 3 Km à parcourir pour atteindre l’école primaire la plus proche, dont 33,4 % en milieu rural et 1,7 % en milieu urbain. Les problèmes d’offre qui sont à la base de telles situations existent surtout en milieu rural.

En effet, environ 39% des enfants en milieu rural habitent à plus de 30 minutes de l’école. Au-delà de 30 minutes, on constate une baisse significative de la fréquentation scolaire. La baisse est aussi sensible dès qu’on quitte le village où se situe l’école. L’écart de scolarisation entre filles et garçons s’accroît en fonction de la distance école-domicile. Ainsi le fait de rapprocher l’école des populations du milieu rural (petits villages, hameaux), permettra d’augmenter l’accès à l’école (taux de scolarisation plus élevé), et bénéficiera en premier aux filles.

Par ailleurs, il s’avère aussi que dans 34% des écoles du pays, la continuité éducative n’est pas assurée : 20% des élèves de 1ère année sont dans une école qui ne leur permet pas d’atteindre la 6ème année. Or, la continuité éducative est un élément essentiel pour éviter la déperdition scolaire et donc pour améliorer à la fois le taux de scolarisation et le taux d’achèvement du 1er cycle. En effet, la rétention peut être faible simplement parce que l’élève ne dispose pas à proximité de son domicile d’une école qui offre toutes les classes d’un cycle complet d’enseignement. Dans un tel cas, quand les parents n’ont pas la possibilité d’assurer le déplacement de leurs enfants dans une localité loin du domicile, c’est l’offre locale qui détermine la poursuite et l’achèvement des études

Afin de réduire les distances écoles- domiciles et d’assurer une continuité éducative, il est prévu de mettre en oeuvre les stratégies suivantes :

La mise en place de Cartes Scolaires Communales (on veillera dans l’élaboration de cette carte à la prise en compte de cette problématique et à son application), qui doivent faire partie intégrante du Plan de Développement Educatif de chaque commune.

La mise en place à travers le programme d’infrastructures du PISE II d’écoles de premier cycle complet avec les 6 années d’étude et d’écoles plus proches des élèves, avec une adaptation de la taille de l’école à celle du nombre d’enfants scolarisables dans la communauté,

Le développement/ recours à des modèles pédagogiques (doubles divisions, classes multigrades) qui permettent de gérer les écoles de petite taille avec l’offre d’un premier cycle complet (6 ans) et, en conséquence,

Le développement de formations ciblant maîtres et encadreurs de maîtres, relatives à la gestion des classes multigrades. Ces modèles pédagogiques qui constituent des stratégies alternatives seront intégrés dans les programmes de formation initiale et continue des enseignants.

L’amélioration de l’accès au second cycle par l’augmentation du nombre d’établissements de ce type et donc un rapprochement du domicile d’un plus grand nombre d’élèves.

 Amélioration de la gratuité

Des fournitures et manuels scolaires

Les coûts liés à la scolarisation à travers les frais de scolarité freinent l’accès à l’école. Les parents doivent payer des cotisations diverses pour que l’école fonctionne convenablement. De plus les parents doivent aussi payer les fournitures scolaires de leurs enfants. Les filles en général, celles du milieu rural en particulier, souffrent de manière disproportionnée de cette situation.

Afin de diminuer pour les parents les coûts liés à la scolarisation et de faciliter l’accès des populations pauvres à l’éducation, le Gouvernement entend poursuivre et consolider sa politique de gratuité des manuels et fournitures scolaires, par la mise en place de systèmes fiables d’approvisionnement et de fourniture assurant à la fois la disponibilité et la gratuité des manuels, des matériels didactiques pour la classe et le maître et des fournitures pour tous les élèves et dans toutes les écoles.

Des frais de scolarité

Bien que l’enseignement fondamental public soit gratuit, les Associations de Parents d’élèves (APE) ou parfois même le directeur d’école, ont institué une cotisation qui permet à l’école d’assurer un fonctionnement minimum par l’achat de petits matériels. Cette cotisation, dont le montant varie selon les localités, pèse sur le budget des couches pauvres et son recouvrement est souvent l’occasion de renvoi temporaire de l’élève qui ne s’en acquitte pas en temps voulu.

Il est prévu au cours du PISE II :

De rendre effective la gratuité du 1er cycle de l’Enseignement Fondamental à travers un appui financier de l’Etat au Comité de Gestion Scolaire de chaque école publique, via les communes, avec l’extension de l’Appui Direct à l’Amélioration des Rendements Scolaires (ADARS) à l’ensemble des écoles du pays pour assurer leur fonctionnement. Dans cette optique, les modalités de mise en oeuvre de l’ADARS seront redéfinies et le manuel de procédures adapté. En contre partie aucune cotisation scolaire ne sera plus demandée aux parents. L’impact de cette mesure sera plus ressenti dans les zones rurales et pour les familles aux revenus les plus faibles.

Outre les manuels scolaires fournis par le Ministère de l’éducation, le matériel collectif de la classe et les fournitures scolaires individuelles des élèves seront acquis par les CGS avec les fonds ADARS. Les CGS seront responsables de la gestion et de l’entretien des matériels, équipements et mobilier scolaires de l’école,

La transformation des écoles communautaires en écoles publiques/communales et par conséquent la prise en charge progressive par les communes des écoles communautaires et de leurs enseignants,

Le transfert de ressources de l’Etat aux Collectivités Territoriales (communes), dès 2007.

Cette politique de gratuité qui sera érigée en pratique dans le 1er cycle de l’Enseignement Fondamental devra avoir le double effet de réduire les abandons et de stimuler la demande surtout dans les milieux les plus pauvres.

4.3.4. Stratégies vis-à-vis des enfants vulnérables

Certaines catégories d’enfants sont particulièrement vulnérables : enfants handicapés, enfants talibés, enfants de la rue, enfants travailleurs, filles domestiques, enfants en milieu carcéral, enfants abandonnés, enfants de familles très pauvres, …

Ces enfants sont souvent marginalisés ou rejetés par la société. Peu d’entre eux sont scolarisés ou suivent une scolarité normale et le système éducatif ne répond pas suffisamment à leurs besoins. Les stratégies actuelles d éducation touchent encore une très faible proportion de ces enfants. Ils sont pourtant concernés comme tous les enfants par l’EPT.

Leurs besoins diffèrent sensiblement selon la catégorie à laquelle ils appartiennent. Afin de leur donner une éducation de base adaptée à leurs besoins, les stratégies suivantes sont prévues :

a. Enfants à besoins éducatifs spéciaux (EBS)

Education spéciale, pour les enfants ayant un handicap lourd.

Extension de la Réhabilitation à base communautaire (RBC) pour identifier les enfants handicapés et amener leurs parents à les scolariser normalement et développement de l’éducation intégratrice permettant de les insérer dans les structures normales de l’éducation.

Prise en charge par les programmes de formation initiale et continue des pédagogies adaptées aux enfants à BES.

Mise en place d’un système national de dépistage de déficit visuel ou auditif en vue d’une prise en charge immédiate.

b. Les enfants « talibés »

Pour une meilleure prise en charge des talibés, la stratégie consistera à renforcer la qualité de l’enseignement dans les écoles coraniques en introduisant des éléments novateurs en vue de préparer les enfants à contribuer au développement économique et socioculturel du pays dans la paix sociale :

Ces écoles coraniques, en plus du fondement religieux, intégreront des apprentissages fondamentaux comme la lecture, l’écriture, le calcul la transcription des langues nationales en caractères arabes et d’autres aspects comme la culture à la citoyenneté et à la paix.

En plus de ces aspects qualitatifs, il est prévu d’améliorer les conditions d’apprentissage dans ces écoles. Cette amélioration portera sur l’équipement et la relation pédagogique.

Dans ce cadre, les efforts du Ministère de l’Education Nationale seront orientés dans les années à venir vers les domaines suivants :

- la définition de stratégies de prise en main des écoles coraniques par le MEN;

- l’élaboration de programmes spécifiques ;

- l’élaboration de matériels pédagogiques adaptés, notamment les manuels ;

- la formation de compétences en matière d’élaboration de modules de formation et de confection de matériels didactiques ;

- l’introduction d’activité pré-professionnelle ;

- la formation des maîtres des écoles coraniques ;

- la sensibilisation des promoteurs d’écoles coraniques, des communautés ;

- l’établissement d’un courant d’échange entre les médersas et les écoles coraniques.

- Le renforcement et l’amélioration de l’offre éducative et l’incitation à créer des médersas dans les zones pourvoyeuses de talibés en attendant la mise en oeuvre des stratégies de prise en main de ces structures par le MEN.

c .Autres groupes d’enfants vulnérables

Création de cadre de concertation avec les acteurs du développement (ONG, secteur privé, etc.) au niveau national et dans les régions, pour développer une offre éducative adaptée aux enfants vulnérables (enfants des rues, aides ménagères, enfants en milieu carcéral, etc.).

4.3.5. L’adaptation de l’offre dans les zones nomades

Les enfants des populations nomades sont sous scolarisés : En effet chez certaines populations d’éleveurs et de pêcheurs (Peuls, Tamasheq, Bozo), le mode de vie marqué par des déplacements saisonniers contraint les ménages à se déplacer avec les enfants, ce qui constitue un handicap pour leur scolarisation.

A partir d’expériences récentes de scolarisation dans le Delta du Niger, il semble que la demande d’éducation soit faible principalement en raison de l’inadéquation de l’offre aux conditions de vie des populations. Ces expériences ont montré que si l’offre éducative est adaptée au mode de vie de ces populations, il existe à leur niveau une demande réelle d’éducation.

Pour répondre à cette demande et accroître les taux de scolarisation dans ces milieux nomades, on procédera :

au renforcement des Cantines scolaires existantes

à la création d’écoles à sites multiples

à l’adaptation conséquente des classes et du mobilier

à l’adoption de mesures d’accompagnement pour l’enseignant de ces zones.

 La stimulation de la demande d’éducation

Malgré l’existence d’une offre d’éducation et les dispositions prises pour rapprocher le plus possible l’école des populations, pour soulager les parents des frais de scolarité, rendre l’école gratuite et de plus en plus attrayante, le constat est que certains parents n’envoient toujours pas leurs enfants à l’école. Les filles en général, les filles rurales en particulier, sont les premières victimes de cette situation.

Plusieurs facteurs expliquent ce manque d’enthousiasme vis-à-vis de l’école parmi lesquels :

(i) le faible rendement externe de l’école qui contribue à entamer la confiance de certains parents qui ne perçoivent pas l’utilité de l’école ;

(ii) le non respect de l’éthique professionnelle par certains enseignants rend les parents réticents à l’envoi des filles à l’école ;

(iii) la persistance des pesanteurs culturelles, notamment les charges domestiques sur les filles, contribuent à leur sous scolarisation en milieu rural surtout.

Afin de stimuler la demande d’éducation, et d’assurer le maintien des enfants (en particulier les filles) à l’école, outre les stratégies liées à la gratuité des fournitures et matériels didactiques et la mise en place de petits fonds de roulement pour appuyer le fonctionnement quotidien des écoles fondamentales, il est prévu les stratégies suivantes:

Des campagnes de sensibilisation à la scolarisation des enfants en milieu rural, notamment les filles, avec des thèmes qui touchent les parents, au niveau national et au niveau local,

L’introduction dans la planification des communes (PDECom) de mesures concrètes pour renforcer la demande locale d’éducation.

Des campagnes de sensibilisation sur l’éthique par l’administration scolaire et certains syndicats, ainsi que l’élaboration et la diffusion d’une charte de l’enseignant.

La dynamisation des Associations de Mères d’Elèves (AME) et la généralisation de cette stratégie à l’ensemble du pays,

L’« éducation parentale » en permettant aux parents de mieux connaître leur enfant, ses besoins, ses capacités, et en les aidant à devenir plus compétents et à mieux prendre conscience de leur rôle d’éducateurs fait acquérir de nouvelles compétences. Elle donne confiance aux parents en leurs possibilités de prendre les bonnes décisions concernant leur enfant car mieux informés, avertis et conscients de leur rôle de premiers éducateurs. Cette éducation parentale se fera à travers

(i) des campagnes de sensibilisation sur le rôle des parents dans l’éducation de leur enfant

(ii) la formation des parents sur les questions de développement de la petite enfance (iii) la formation des parents à assurer leur futur rôle de parents et d’éducateurs.



26/05/2010
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